Respirer, contempler, paresser, se balancer… Tout ce qui fait du bien se passe dehors. On y met donc de la rondeur, de la souplesse, de la douceur… et de la nature.
Texte par Aliette de Crozet
Une oasis à 100 mètres des Champs-Élysées? L’Hôtel de Berri s’apprête à ouvrir à sa clientèle les anciens jardins de la créatrice de mode Elsa Schiaparelli. Pascal Dokhan, propriétaire des lieux avec son frère, y voit l’aboutissement d’un rêve de haute hôtellerie. Ces 3000 m2, repaire de bien-être et de biodiversité, accueilleront des nichoirs pour les oiseaux, des nids en osier pensés par les paysagistes de Sauvaje, jardiniers du vivant. Dans l’esprit humaniste de cet ancien hôtel des impôts truffé d’œuvres d’art, le jardin n’est pas un simple « plus ». «C’est essentiel, c’est le poumon d’un lieu, note l’architecte d’intérieur Laurent Maugoust. Je ne travaille plus nulle part sans paysagiste. » Comme bon nombre de ses confrères. À l’Oasis du Martinez, à Cannes, au Jardin remarquable de La Nauve qui ouvre ce printemps à Cognac, ou au parc du Château de Beaulieu, dans le Pas-de-Calais, le jardin est un écosystème.
Christophe Dufossé, propriétaire de ce dernier, Relais & Châteaux, explique : « Nous avons pensé une identité globale pour immerger nos clients dans la nature… mais dans le plus grand confort! » Résultat : 80 m2 de terrasse, 100 m2 de véranda avec double vitrage chauffant et toit végétalisé, des passerelles vitrées reliant les différents bâtiments, l’occasion d’admirer le couloir de nage à flanc de douve, le potager, la serre d’agrumes, la basse-cour, le verger, le jardin de fleurs comestibles, les arbres centenaires, les jets d’eau de l’étang… Six millions d’euros pour un monde plus beau.
Les hôteliers investissent davantage dans ce « poumon » qui permet de respirer. Ils repensent le mobilier, bien sûr : il doit être résistant, comme les tables et assises de la collection « Tuileries » d’Edmond & Fils au Château des Broyers, en Bourgogne, ou à la Manufacture Royale de Lectoure, dans le Gers; mais aussi élégant, à l’image de la collection « 1800 » de Tectona, dont on retrouve les chaises longues autour de la piscine de l’hôtel Saint James, à Paris, et les fauteuils au Brenners Park-Hotel & Spa à Baden-Baden, en Allemagne; et bien sûr pratique, comme les produits de Lafuma Mobilier, autre spécialiste de l’outdoor made in France, tout juste labellisé Entreprise du Patrimoine Vivant, qui a confié sa gamme hôtellerie-restauration, « Horizon », aux designers suisses de Big-Game. Ils ont voulu une collection maniable : fauteuils à suspendre, plateaux basculants… assortis d’un trolley, pour faciliter le travail du personnel.
Qu’il s’agisse d’un jardin ou d’une terrasse, les extérieurs, devenus la vitrine des hôtels, attirent bien au-delà de leur clientèle. On leur demande donc une identité forte « qui se prête à la mise en scène voulue par le décorateur », note Jérôme Armaroli, chez Sifas. « On désassortit volontiers, on évite le total look. » Les clients veulent paresser, se lover, lire, travailler changer de place, prolonger les apéritifs… Alors les canapés « Playground » (Maison de Vacances) se dilatent, la tendance est à l’arrondi, à ces coussins que l’on enlace pour de grands hugs (chez Vondom) et qui profitent de la résistance toujours accrue des tissus d’extérieur… Les poufs sortent en plein air, se transforment en tables sanglées (chez ADM) ou, couverts de bouclettes ou de velours, dialoguent avec les cannages ou les tissages de cordes en polypropylène qui offrent un fini artisanal (Vincent Sheppard Outdoor). Et le soir, on fait confiance aux luminaires solaires. Ceux de la marque Les Jardins, conçus à Aix-en-Provence, s’exportent dans plus de 45 pays.
allemande Markilux s’est fait une spécialité de ces stores dont la toile peut disparaître
comme ici sous une avancée de toit ou dans un coffre.
En journée, la terrasse prend sa place au soleil… Justement, le soleil! Le fabricant de solutions d’ombrage Markilux, sollicité pour couvrir des domaines viticoles, l’est aussi pour des terrasses. Stores-bannes, pergolas, vérandas arrêtent la pluie et les UV. Jérome Foucault, directeur général de KE France, est le premier surpris par le succès de « Sunlight », une pergola au toit en verre, éclairée, qui peut intégrer un store horizontal à toile enroulable contre le soleil. Elle a reçu le Design Award d’Archiproducts en 2022. Le but de la société est d’apporter une surface d’exploitation supplémentaire, et de laisser se confondre intérieur et extérieur. À la campagne, mais aussi en agglomération, « la terrasse met le client en cœur de ville et le fait participer à son art de vivre dès le petit déjeuner. Alors que les hôtels se vivent comme des tiers lieux, elle accueille aussi le coworkeur solitaire »,relève Nicolas Schmoll, responsable communication chez Younight Hospitality. Tous les Rennais, assure-t-il, connaissent ainsi le patio du Balthazar Hôtel & Spa avec ses fontaines en plexiglas et ses murs végétalisés. Au Maisons du Monde Hôtel & Suites de Marseille (voir le city guide p. 40), également partie du groupe Vicartem, les chaises empilables façon bistrot, en simili-raphia et rotin, les tables aux pieds réglables et aux plateaux rabattables et tout le mobilier de la célèbre marque de déco ont été choisis spécialement par Céline Meslin, la directrice de Vicartem. Dans cet esprit-là : une salutation au soleil sur le Vieux-Port. Droit au but!
Sur le front des parasols
Le point commun entre le Club Med de Tignes et la confidentielle The Address à Cassis ? Tous deux ont opté pour des parasols Belveo, équipés d’un système Easywind anti-vent breveté, et dont les toiles acryliques protègent des UV et laissent passer l’air. Comme l’a compris la jeune entreprise française, les parasols sont une source de stress pour l’hôtelier : ils s’envolent, tombent, sont peu maniables… Dans le même souci de faciliter la vie, Vlaemynck propose un service de location saisonnière très prisé : livraison en début de saison et reprise en fin de période, lavage, réparation et hivernage compris.
On s’en balance
Ethimo possède un grand art de l’outdoor. Dernière démonstration avec la chaise « Kilt » à l’hôtel Le Coucou, à Méribel. La famille de Carlo Confidati, son créateur, a bâti cette expertise dans son jardin dédié aux pivoines à Vitorchiano, en Italie. Alessandro Maietto, responsable France de la marque, constate l’envol de la balancelle : « Le vacancier cherche une expérience, il a envie de légèreté. » L’alcôve « Hut », dessinée par Marco Lavit, et toute la gamme des balançoires lui permettent « de retrouver l’esprit de l’enfance ».
Article paru dans le numéro 127 d’Hôtel & Lodge.
