Énigmatiques, sans repères, plus douces en apparence que celles de la mer, les vagues de sable du désert de Wahiba, au sultanat d’Oman, sculptent des dunes profondes, nids naturels pour bivouac chic.
Par Anne Marie Cattelain Le Dû
Séjourner deux ou trois nuits dans les Wahiba Sands, dits aussi Sharquiyah Sands, désert de poche de 180 kilomètres sur 80, démarrant des montagnes orientales du Hajar et filant vers l’océan Indien, c’est plonger au cœur de la culture nomade à bout de souffle.
Depuis plusieurs années, les Bédouins se sédentarisant dans les villages à proximité des écoles et des dispensaires changent de mode de vie, délaissant peu à peu leurs traditions. Seules 2 000 familles semi-nomades parcourent encore le désert, avec leurs troupeaux de chèvres et de dromadaires. Les plus racés et doués de leurs camélidés participent à des courses déchaînant les passions et les paris des Omanais. Choyées, massées, abreuvées d’eau minérale, nourries de bouillie de dattes, de miel et de lait, ces bêtes sont leur richesse, leur raison de demeurer au plus près des dunes. Des stars qui, retroussant leurs lèvres charnues, narguent avec dédain ceux qui s’aventurent sur leur territoire.
Oman, triptyque de sable, de pierres et d’océan
À deux heures seulement de Mascate, la capitale, les premières dunes exposent avec superbe leur palette colorée du rouge brique au blond platine, se hissant jusqu’à 200 mètres d’altitude. Le Magic Private Camp Wahiba Sands, dernier-né des lodges de toile, inspiré des tentes bédouines, colonise, de fin septembre à mi-avril, lorsque les températures diurnes et nocturnes restent raisonnables, un long cordon face au soleil couchant. Compte tenu de sa capacité réduite, il se prête aisément aux privatisations en famille ou entre amis.
Ses 10 suites nichées frileusement au creux d’une large cuvette naturelle abritent les hôtes du vent accourant de l’océan Indien. Comme dans un 5-étoiles, chaque suite compte deux espaces distincts, en l’occurrence deux tentes. Une chambre meublée avec sobriété en camaïeu de beige et d’ocre, à l’unisson de l’environnement, et à la literie impeccable s’étale sous la plus grande toile.
Next door, on se « baque » à l’eau chaude, mais oui, dans la salle de bains, fraîche et écologique, avec vasque en métal et douche à l’indienne. Dépaysement, sérénité, intimité, confort !
Dès que les sables engloutissent le soleil, que les étoiles que l’on observe au télescope, guidé par un astronome, illuminent le ciel vierge de toute pollution, les hôtes gagnent le majlis, pour écouter musiciens, chanteurs, conteurs venus des plus proches villages.
Sous un grand dais de toile, ce majlis, espace traditionnel voué aux palabres sur toute la côte est africaine jusqu’à la péninsule Arabique, joue les lounge bars. Tapis tissés, divans bas, lumières tamisées, objets et textiles artisanaux invitent aux confidences, au prélassement. Instants privilégiés d’échanges, avant de savourer le menu locavore autour d’une longue table. À moins de dîner en tête à tête, éclairés par des chandelles, dans le secret d’une dune annexe repérée et aménagée avec soin par le chef de camp, dans le silence assourdissant du désert, rompu parfois par le crépitement du feu de camp. Puis de choisir ensuite, désertant sa tente, d’y dormir sur un lit à baldaquin, avec comme unique horizon le ciel…
De villages en élevages
Assister à l’entraînement des dromadaires voués à la course, visiter des élevages, des campements bédouins mais aussi des villages proches, des oasis, voire des forts, des mosquées, skier sur les dunes : autant d’activités organisées sur mesure, à la demande, pour appréhender Oman différemment.
Refuser en revanche slalom, rallyes, courses plein pot dans les dunes, dangereux et nuisibles à l’environnement.
Carnet de voyage
Un séjour de deux à trois jours dans les dunes, avec des activités organisées à la demande, permet d’appréhender Oman différemment. Tselana Travel, spécialiste du sur-mesure, tricote avec intelligence des circuits individuels dans ce sultanat, de Mascate aux rives océanes, en transitant par le désert.
Plus d’informations sur tselana.com
L’écologie en une
Pas question de laisser dans le désert, écosystème de plus en plus fragile, la moindre empreinte d’un passage humain. En dehors de la saison, lorsque le camp est démonté, les dunes retrouvent leur totale virginité. Le site est pourvu en électricité par des batteries solaires, l’eau est distribuée avec mesure et entièrement recyclée pour ne pas polluer les sables. Tous les plastiques sont interdits de séjour et la nourriture la plus locavore possible : agneau, chèvre, poisson frais pêché dans l’Océan indien proche.
Frère voisin : Dubaï
Le désert dubaïote résistera-t-il encore longtemps à l’avancée irrémédiable de la ville, à l’urbanisation ? Véritable respiration, témoignage d’un passé proche – une cinquantaine d’années –, il déroule son fragile cordon dunaire à 60 Kilomètres du centre de la ville, du Burj Khalifa. Avec seulement huit tentes, plantées au pied d’une longue dune rouge, le Magic Camps de Dubaï transporte, loin des tours de plus en plus hautes, dans l’histoire des émirats et des Bédouins. Aujourd’hui, ce peuple du désert délaisse le rythme chaloupé des dromadaires pour l’ivresse des 4×4. Ces gros engins écrasent de leurs pneumatiques les sables et leurs habitants invisibles, les lézards, les insectes tels que les scarabées en voie de disparition et les scorpions. Refuser de slalomer dans les dunes, c’est respecter cette faune et l’écosystème.
https://www.magic-camps.com/fr/destinations/camps-prives-oman
Article paru dans le numéro 118 d’Hôtel & Lodge