Dans la réserve de Linyanti, au nord du Botswana, dominant la lagune, DumaTau et Little DumaTau, camps Wilderness, entièrement reconstruits, ressemblent à des gabions blottis sur les berges. Au plus près de la faune et des derniers-nés.
Par Anne Marie Cattelain-Le Dû
Ciel dégagé, piste d’atterrissage en vue. Le pilote de l’avion-taxi reliant Maun à DumaTau peaufine son approche… et amorce soudain une légère remontée. Au soleil déclinant, une lionne et ses deux lionceaux sommeillent à découvert, pile face à la cabane jouant les aéroports de fortune. Fofolles, inconscientes du double danger, des dizaines d’antilopes et leurs bébés surgissent de la brousse, gambadant non loin de la famille fauve.
Nez collé au hublot, les trois passagers, deux Américains et moi, suivons, ébahis, cette scène de safari non programmée. À grands gestes désespérés et cris stridents, le chauffeur du 4×4, délégué pour nous accueillir, tente de chasser les animaux. La lionne et sa portée demeurent impassibles. Les antilopes se hissent sur le talus pour mieux revenir quelques secondes après, perçant une nouvelle brèche dans les hautes herbes. Dix minutes d’un ballet à la chorégraphie brouillonne, avant que les félins s’éloignent de quelques mètres et que les impalas regagnent le couvert. Atterrissage dans un nuage de poussière. Essoufflé, en sueur, rouge, Ronald, le ranger, bégaie quelques mots de bienvenue.
Animaux sans limites
Direction DumaTau… Maquillés d’un léger voile de latérite, à peine débarqués sur le long deck, avant de rejoindre sa suite de toile, on se repaît des couleurs pastel et argent de la lagune d’Osprey. Heure bénie, sereine, petite musique de nuit digne de Mozart, avec le clapotis de la rivière, le sifflement des Batis et des souimangas, oiseaux chanteurs, volant vers le faîte des arbres, et la note quasi mécanique des puissantes mâchoires des éléphants, broyant sans vergogne feuillage et branches, tandis que leurs petits, nés en janvier, pataugent, patauds, dans la vase.
Demain, dès l’aube, on explorera les alentours. Selon le vent, le soleil, l’instinct du ranger, on ira vers le sud suivant le canal de Savute, colonisé par les hippopotames, les crocodiles et les aigrettes, ou vers le nord, le long du dernier vestige de la Great African Rift Valley, habitat favori et tranquille des léopards, des lions et des lièvres des buissons. Pour l’heure, avant le dîner sous les étoiles, dans le boma, on prend ses marques. Après une douche bienfaisante sur le deck extérieur de sa grande tente éclairée par la pleine lune, on apprécie son nouveau décor, les luminaires légers, les teintes volées à la savane et la rivière, lorgnant le grand lit où on rêve de se blottir. Plus tard !
Des chefs offrant le meilleur de leur pays
Autour du feu où cuit à l’étouffée et sur les braises le dîner concocté par la cheffe Kapeturua dit Pet, Corrie Brits, le general manager, explique que « en 2018, Wilderness Safaris a souhaité, sans trahir leur personnalité, réenchanter ses deux camps les plus populaires du Botswana, DumaTau, sept chambres, et Little Duma Tau, quatre chambres, facilement privatisable. Le directoire s’est adressé à Anomien Smith, architecte de Luxury Frontiers, agence conceptrice de lodges intégrés dans leur environnement, et au studio anglais Artichoke Interiors Design de Dawn Jacobs.
Ils ont associé à leur réflexion Gina Waldman, jeune artiste sud-africaine métissant peinture, perles et végétaux. Les architectes ont réorienté les chambres pour offrir une vue plus vaste sur l’eau. La piscine principale a été alignée de sorte qu’elle semble fusionner avec les eaux sombres de la rivière.
Malgré l’intrus, le Covid-19, malgré les retards, les blocages, nous venons d’ouvrir, avec quelques mois de retard. Prêts, plus que jamais, à partager notre territoire avec nos amis du monde entier. » Le territoire, avant tout, des animaux sauvages qui, sans vergogne, se hissent pour certains au bord de la piscine, alors qu’on imaginait s’y rafraîchir, voire osent un œil à travers les stores du tout nouveau spa Osprey Retreat. Devenus plus hardis pendant ces longs mois sans visiteurs.
Un lodge écoresponsable
Ici, pas de béton, on a réutilisé le bois de l’ancien lodge, celui des palettes pour transporter le matériel comme revêtement des tentes en toile. Les coussins teints à la main ont été taillés dans les vieux pneus des 4×4. Les camps fonctionnent à 100 % à l’énergie solaire. Toute l’eau est chauffée par des geysers solaires et les pommes de douche sont équipées d’économe.
Qui plus est, le lodge participe à la préservation des chiens sauvages mais aussi, pour éviter qu’ils ne contaminent les habitants, à leur vaccination contre la rage et à l’éradication des tiques transmettant la maladie de Lyme.
Une cuisine locavore
Les chefs, rompus aux méthodes de cuisson traditionnelles, préparent des plats locaux, enrichis de super-aliments cultivés à proximité : graines de baobab, truffe du Kalahari, marula (fruit adoré par les éléphants), moringa (plante antioxydante), légumes-feuilles, herbes poussant sur les rives de la Thamalakane. Pour les pâtes, les gâteaux, le pain, ils optent, en priorité, pour les céréales locales, le millet, le sorgho. Rien n’est importé en dehors de l’Afrique australe, ce qui contribue à réduire l’empreinte carbone du camp et à soutenir les agriculteurs du Botswana.
www.dumataucamp.fr
Article paru dans le numéro 119 d’Hôtel & Lodge