Southern Ocean Lodge, résurrection à Kangaroo Island

Avec pour seul vis-à-vis les longues vagues turquoise nées dans l’Antarctique sur lesquelles surfent les lions de mer et les dauphins et pêchent les pingouins, le plus étonnant des repaires australiens en haute mer renaît de ses cendres.

Texte Anne-Marie Cattelain-Le Dû / DR

Juin ! L’hiver austral, sous une légère brise de nord/nord-est, cache son jeu, anormalement ensoleillé, sous un ciel bleu dur. Les pluies, tant attendues, flemmardent sous d’autres latitudes. Dans les prairies, que les embruns alliés au vent assèchent, moutons à la toison drue et kangourous au pelage sombre tirent la langue, se disputant une herbe rabougrie, grisâtre. Seuls les koalas peureux et gloutons, cachés au faîte des arbres, grignotent goulûment les feuilles d’eucalyptus rugueuses et parfumées. La poignée d’habitants – 4 000 – de la troisième plus grande île d’Australie, quatre fois la superficie de Hong Kong, guettent, anxieux, les nuages, après l’été brûlant. Se souvenant qu’en février 2020, le feu, attisé par un vent rageur, instable, tourbillonnant à plus de 100 km/h, embrasa 40 % de leurs terres assoiffées. Désastre. Le lodge, construit douze ans plus tôt par Hayley et James Baillie, encerclé par les flammes s’effondra. Seule la sculpture en fer d’un kangourou géant résista. Depuis décembre dernier, elle trône dans le lobby, accueillant de nouveau les hôtes. L’instant de sidération, de découragement passé, les Baillie rebâtirent l’hôtel chouchou de leur collection, sur les mêmes bases, les mêmes plans, selon les mêmes concepts, avec la complicité de leur architecte designer Max Pritchard – ce dernier a passé son enfance et son adolescence à Kangaroo Island, dans la ferme de ses parents.

Les suites sont conçues pour préserver au maximum l’intimité des hôtes. © DR
The « great room », ou lobby, une vigie pour repérer baleines, dauphins… © DR

Les 25 suites tout en courbes lascives, perchées sur les falaises de calcaire blond, scrutent de nouveau l’océan Austral et le récif. Leurs occupants, avec ou sans jumelles, épient de leur terrasse le passage des baleines et les silhouettes affûtées des requins. Toutes ces suites portent et racontent le nom d’un bateau ayant accosté l’île depuis sa découverte, en 1801. Auparavant, personne n’avait ni revendiqué les lieux ni même posé le pied sur l’île, protégée par les récifs épars et les énormes rochers qu’aucune balise ne signalait. Curieusement, deux navigateurs y débarquèrent en même temps. L’un, Nicolas Baudin, officier de marine français, à bord de sa goélette, géographe mandaté par Napoléon Bonaparte, premier consul, pour étudier faune et flore australes. L’autre, Mattew Flinders, explorateur et cartographe britannique. Les deux marins, dont les pays étaient ennemis, se croisèrent et échangèrent sur la côte nord-est, dans la baie d’Encounter. Mais seul Baudin boucla le tour de l’île, dessinant ses contours avec précision. Les noms français et bretons de quelques rochers, passes et lieux-dits témoignent toujours de la présence du navigateur. Sur ses ordres, son équipage captura un kangourou et un émeu qui, résistant à la traversée, furent offerts en 1802 à Joséphine de Beauharnais.

Tombés en amour de l’histoire surprenante et rude de ces côtes déchiquetées, les Baillie, jeune couple trentenaire, achetèrent en 2002, à l’extrême ouest de l’île, 100 hectares de lande dominant Hanson Bay. Leur intention : y ériger un lodge marin, 5-étoiles, modèle de développement durable. Conscients de la particularité et de la fragilité de l’écosystème insulaire, soumis à des conditions climatiques extrêmes, les nouveaux propriétaires veillèrent à réduire l’impact de leur construction sur l’environnement, n’occupant que 1 % des 100 hectares acquis. Le soleil pour source énergétique, la pluie récoltée, stockée, recyclée systématiquement pour couvrir tous les besoins en eau, Southern Ocean fonctionne quasi en autarcie. Tom Saliba, le chef, s’approvisionne au maximum sur l’île, regrettant que la législation lui interdise d’acheter poissons et crustacés directement aux pêcheurs et que dans son potager, les légumes et herbes ne demeurent qu’un rêve, faute d’un sol généreux.

25 suites panoramiques semblables à des cabines d’un grand yacht de luxe. © DR
Desservies par une coursive, les suites portent le nom d’un bateau ayant accosté l’île.  © DR

« À quelque chose malheur est bon », affirme un proverbe populaire. Les habitants de Kangaroo Island le constatent chaque jour. Le sol débarrassé par l’incendie des acides, pesticides et parasites accumulés, certaines plantes et fleurs, répertoriées par Baudin, disparues depuis des lustres, réapparaissent. Et si les arbres projettent toujours vers le ciel, comme s’ils l’imploraient, leurs branches nues, noircies, la base de leur tronc préservée se couvre de nouveau d’une végétation touffue, et quelques feuilles pointent leur vert tendre. Les quatre enfants Baillie, quatre garçons, dont l’aîné esquissa ses premiers pas en 2002 sur la plage en contrebas du terrain nouvellement acquis par ses parents, et le quatrième et dernier, né en 2008, quelques jours avant l’ouverture du lodge, confient, malgré leur jeune âge, leur envie de sauvegarder KI, comme ses habitants et ses amoureux appellent affectueusement ce gros caillou qui, un jour de chaos, se détacha de l’île principale. 

100 % all inclusive

En dehors de la pension complète, les hôtes sont ici chez eux, pouvant à tous moments de la journée se servir au bar, réaliser, en suivant les recettes à disposition, les cocktails de leur choix ou demander au barman de leur préparer, hésiter entre une flûte de champagne français, un verre des meilleurs crus de vins australiens, une bière, un soft drink, un thé ou un latte café tant apprécié ici. Boissons à discrétion, à moins de souhaiter un flacon hors norme au déjeuner ou au dîner. Les expéditions, les balades quotidiennes diurnes et nocturnes, en compagnie de guides experts, pour découvrir les coins les plus remarquables de Kangaroo Island, son histoire, ses animaux, entrent dans le forfait. À noter : pour assurer la tranquillité des hôtes, les enfants de moins de 10 ans ne sont pas acceptés.

Voler vers Kangaroo Island

De Paris-CDG à Tullamarine, Melbourne : compagnie internationale basée à Hong Kong, Cathay Pacific dessert quotidiennement, au départ de Paris-CDG via Hong Kong, Melbourne, deuxième plus grand aéroport d’Océanie. Comptez 11 heures de Paris à Hong Kong, puis 9 heures de Hong Kong à Melbourne. Ses appareils dernière génération offrent un confort maximal avec en business des sièges-lits ultra-confortables et une offre gastronomique remarquable : mets signés de grandes tables australiennes telles que Louise et Duddell’s, belle carte de vins français et australiens. Cathay Pacific poursuit une politique de réduction de ses émissions de carbone et s’est engagée à utiliser de plus en plus de carburant aviation durable.

Vol A/R Paris CDG-Melbourne à partir de 1 699 € en classe économique, 2 759 € en premium économie et 6 979 € en classe affaires. cathaypacific.com

Toutes les îles, les vraies, non reliées à la terre ferme, se méritent. Kangaroo Island n’échappe pas à la règle. De Melbourne, on emprunte deux vols intérieurs de 50 minutes chacun opérés par Qantas, principale compagnie aérienne australienne. qantas.com

Article paru dans le numéro 135 d’Hôtel & Lodge.

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