Maybourne Riviera, vertige sidéral

Comme un logo géant en équilibre sur la colline, au-dessus de la Méditerranée entre Menton et Monte-Carlo, le Maybourne Riviera, 5-étoiles signé Jean-Michel Wilmotte, défie les lois de la pesanteur. 

Par Anne Marie Cattelain-Le Dû

Des cubes et des cubes enchevêtrés de métal blanc, vitrés, comme posés en vrac, prêts à chavirer dans les flots à quelques centaines de mètres plus bas. Première impression lorsqu’on négocie le long virage au-dessus de Roquebrune-Cap-Martin débouchant devant le nouveau 5-étoiles ultra-luxe de la baie monégasque. Au fil des années, on s’était habitué à voir le Vista Palace, figé dans le ciel comme un nid d’aigle, ceint d’une dentelle de grillage pour entraver sa chute, sombrer inexorablement dans les broussailles.

Réparties sur trois ailes, les 70 suites se parent de mobilier exclusif et de blanc, contrastant avec les couleurs vives et changeantes de la Méditerranée. Leurs grandes terrasses ou balcons filants dévoilent largement le paysage.

L’hôtel haut perché, de projets avortés en achats annulés, devenait ruine, sans avenir ; jusqu’à son rachat en 2016 par le groupe hôtelier Maybourne, détenu en majorité par un fonds d’investissement qatari et l’Irlandais Patrick McKillen. Là encore, l’affaire faillit tourner court : au moment de l’ouverture, Patrick McKillen, dit Paddy, propriétaire, entre autres, de Villa La Coste et partie prenante dans les palaces londoniens du groupe Maybourne, le Claridge’s, le Connaught et le Berkeley, s’étant retiré sur la pointe des pieds. No comment !

En suspension dans le vaste lobby, la sculpture d’un couple enlacé de Louise Bourgeois, l’une des 1 000 œuvres d’art de l’hôtel, capte immédiatement l’attention. En suspension également, la piscine à débordement, près du spa, se niche dans la roche à l’abri du vent, face aux côtes italiennes.

Dès le lobby cependant, la présence de l’ex-actionnaire transpire. Une sculpture monumentale, suspendue, de Louise Bourgeois, rappelant The Couple trônant à Villa La Coste, cohabite avec un panneau de verre coulissant de Le Corbusier où se brisent les rayons du soleil. Malgré cette rupture, Paddy a, pour le moment, laissé en place les œuvres d’art extraites de ses collections, plus de 1000 éparpillées dedans, dehors, les jardins dessinés par Jean Mus prolongeant l’hôtel de façon magistrale.


L’audace de l’architecture aérienne, tranchée, de Jean-Michel Wilmotte s’intègre harmonieusement dans la roche. Quant à la carte écoresponsable du chef Mauro Colagreco, exécutée avec brio par le jeune Andrea Moscardino, elle a été auréolée d’une étoile quatre mois après l’ouverture.

En gagnant sa suite, au hasard des couloirs, on admire peintures, dessins, mobiles, sculptures, photos. Située stratégiquement en angle, ourlée d’un long balcon transparent, elle dévoile tout à la fois Monaco, invraisemblable chantier géant où les grues métalliques s’agitent en tous sens, et, du côté de Roquebrune, le rivage plus tranquille, sauvage, avec ses plages de poche ; à l’horizon, la côte italienne.

Hypnotique, ce panorama est l’attrait numéro un de toutes les suites, qui bénéficient de terrasses ouvrant sur le large. Des transats invitent, lorsque le vent ne chahute pas l’ordre des choses, à s’y prélasser, à moins de préférer, perturbé par le vide, se réfugier dans le grand canapé du salon, appendice gracieux de la chambre.


Au piano-bar, avec vue sur la mer, on savoure un premier café dans la clarté douce du matin, un verre de blanc au soleil à midi, un cocktail le soir, sous la lumière tamisée.

Pour personnaliser chaque espace, outre l’équipe de designers internes qui a œuvré sous la houlette de Michelle Wu, se sont succédé André Fu, Bryan O’Sullivan Studio, Marcelo Joulia, Pierre Yovanovitch, Pascal Goujon, Rigby & Rigby. Leurs styles heurtés se fondent pourtant sans fausse note.

Ils rythment les espaces, animent le blanc, couleur dominante qui habille aussi les quatre restaurants avec, au cœur du propos épicurien, Ceto, à la carte définie par le chef triplement étoilé du Mirazur à Menton, Mauro Colagreco. Adepte de la pêche durable, à la ligne, de la préservation des espèces en voie de disparition, de l’approvisionnement locavore et bio, il a confié les cuisines à deux de ses disciples : le jeune chef italien Andrea Moscardino et la cheffe pâtissière Julieta Canavate.

Des passionnés, défendant bec et ongles les petits producteurs et une cuisine franche où les légumes tendres à croquer, cueillis à peine poussés, le disputent à la ventrèche de thon maturée deux mois, suant de bon gras, où le pain éponge l’huile au mimosa marin de l’Huilerie Saint-Michel et la peau de murène devenue chips à l’encre de seiche énerve les papilles. 

Article paru dans le numéro 122 d’Hôtel & Lodge

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