Les pieds dans l’eau ou à flanc de colline, ces boutique-hôtels de la Côte d’Azur exaltent le mythe et la beauté grandiose de la Grande Bleue. Quatre adresses au panorama unique et au charme irrésistible. Quatre coups de cœur pour une escapade d’arrière-saison, bercée par les flots.
Texte Céline Baussay et Laura Pertuy
01 – CAP D’ANTIBES BEACH HOTEL
L’architecture aux lignes fluides, le décor minéral, le jardin exotique sous les palmiers, le bar en rotonde et le rose poudré omniprésent, des parasols sur la plage jusqu’au marbre des salles de bains… le Cap d’Antibes Beach Hotel affiche un faux air de villa moderniste, quelque part en Floride ou en Californie. Et pourtant, le dernier-né d’Adresses Hotels (La Ponche à Saint-Tropez, Monsieur Aristide ou Monsieur George à Paris…) se trouve bien sur la Côte d’Azur, et surtout, chance inouïe, il borde une délicieuse petite plage de sable fin, face aux îles de Lérins. La tentation est grande ici de simplement buller, de ne marcher que pieds nus. Et d’ailleurs beaucoup de clients ne s’en privent pas…
Nicolas Saltiel, le fondateur de The Adresses Hotels, a choisi Bernard Dubois pour offrir au lieu une nouvelle cohérence esthétique et un mobilier sur mesure : « J’aimais beaucoup le côté épuré qu’il a donné aux boutiques Aesop, son travail sur les espaces, les profondeurs, les perspectives, les ombres et les lumières. » Dans le 5-étoiles, Relais & Châteaux, l’architecte belge a su magnifier les 35 chambres et suites, en étage vue mer ou en rez-de-jardin, comme des maisonnettes au calme et au vert. « La végétation est un élément-clé du projet, souligne Nicolas Saltiel. Nous avons créé un jardin exotique, installé deux pergolas, l’une pour les massages en duo, l’autre pour les cours de yoga avec Le Tigre, un terrain de pétanque… » Autres nouveautés, le spa Holidermie, le kids club et, autour de la plage, le bassin sensoriel, le solarium en surplomb des rochers et le très festif restaurant Baba du chef israélien Assaf Granit : un bon complément au gastro étoilé, Les Pêcheurs, une institution locale, prisée de la jet-set dans les années 1950, réputée pour sa vue sur la baie au coucher du soleil et pour ses plats de poisson d’une fraîcheur absolue. Et pour cause, le chef Nicolas Rondelli s’approvisionne au port du Crouton, littéralement à une minute à pied !
02 – LE MAQUIS
Même les plus anciens de Porticcio, à l’ouest de l’île de Beauté, ne se souviennent sans doute pas de cette maison qui servait autrefois de salle de classe. C’était au tournant des années 1950, avant que Catherine Salini, alias Ketty, la fille de l’institutrice, l’investisse pour créer un bar. Non loin de là, elle fait ensuite construire une bâtisse pour y créer quatre premières chambres. En 1968, elle passe à la vitesse supérieure, avec la complicité de Georges Grateau, l’architecte de la Madrague de Brigitte Bardot, et pose les bases d’un hôtel pas comme les autres, marqué par sa personnalité, ses goûts, son sens de l’accueil : « Chaque invité doit se sentir ici comme chez moi », déclarait-elle alors. Mobilier chiné, portraits de ses ancêtres, tableaux de peintres locaux, objets et bibelots en tout genre… Ketty décore les lieux, des salons cosy aux terrasses ombragées, comme sa propre demeure, suivant son instinct, ses envies, ses coups de cœur.
Sept ans après son décès, tout ce qui fait l’âme et le caractère de l’hôtel est intact. Sa fille, Chantal Gozzi, directrice générale, son fils, Gérard Lorenzoni-Salini, chef du restaurant L’Arbousier, et ses petites-filles Sandrina, Lydia et Fleur, elles aussi membres de l’équipe, en sont les garants. Désormais 5-étoiles, Le Maquis possède 25 chambres et suites spacieuses, toutes différentes, avec des vues directes sur la Méditerranée, dont un penthouse exceptionnel à l’étage le plus élevé. Juste pour deux personnes… Les tissus Pierre Frey, les amenities Guerlain, les baignoires balnéo, les technologies dernier cri apportent l’indispensable modernité. Les années passent et la magie perdure : le personnel est tout aussi fidèle que les clients – beaucoup d’habitués –, attachés à l’esprit unique de cette maison du bonheur.
Détente et visites :
Ouvert toute l’année sauf en janvier, Le Maquis est une adresse à vivre en toute saison. En complément de la plage de sable fin et doré à ses pieds, il possède deux piscines à débordement, dont une en belvédère, et un espace bien-être avec sa piscine intérieure. Il se prolonge avec un jardin qui fleure bon la Méditerranée. L’hôtel organise des programmes à la carte pour ses clients, les invitant à se balader dans Ajaccio, à partiren excursion sur les îles Sanguinaires, à découvrir par la route ou depuis la mer les baies au bord du golfe ou l’arrière-pays, le village de Bastelica, le lac de Vitalaca, la vallée du Tàravu…
03 – LA PÉROUSE NICE
C’est sans doute l’un des secrets les mieux gardés de la baie des Anges. À l’abri des regards derrière les bâtisses voisines, La Pérouse est comme suspendu au-dessus de la ville : la haute demeure à la façade jaune provençal a été érigée six étages au-dessus du quai Rauba-Capeu, au sommet de la colline du Château, en 1936 – ce qui en fait l’un des plus anciens hôtels de Nice. Face à lui, l’horizon bleu de la Méditerranée et du ciel sans nuage. Virginie Friedmann et Delphine Versace, les architectes du studio homonyme, viennent de le ressusciter : « Ce lieu est incroyable ! s’enthousiasme encore la seconde, elle-même niçoise d’origine. Accroché aux rochers, tourné vers la nature, vers le paysage, avec un dédale de pièces qui nous a permis de renforcer l’esprit hôtel de famille. » Le duo signe ici un 4-étoiles labellisé Small Luxury Hotels of The World au design poétique, solaire, azuréen.
Pour leur premier projet dans l’hôtellerie, elles ont repensé les espaces et dessiné sur mesure tout le mobilier aux formes douces. « Nous avons suivi quatre leviers importants, précise Virginie Friedmann : faire écho à la mer (par exemple avec les lampes et les poignées des armoires en forme de coraux), multiplier les références à la Provence (avec l’idée de la place du village pour la terrasse du restaurant, l’utilisation du rotin, de l’osier, de la terre cuite), célébrer les maîtres de l’art (avec les motifs inspirés des dessins de Cocteau pour les tables, de Matisse pour les garde-corps des escaliers) et collaborer avec les artisans, de la région notamment (qui ont réalisé la cheminée, les vitraux, le comptoir recouvert de coquillages, l’arrière-bar en éclats de nacre…). » La Méditerranée se dévoile en panoramique depuis la plupart des 53 chambres, mais surtout du vaste rooftop à 92 mètres de haut, et de la suite « Méditerranée » en contrebas : une petite merveille de maison à l’accès privé, avec Jacuzzi et terrasse en angle, qui s’avance comme une proue de bateau. Peut-être celui du comte de La Pérouse… Avec une vue à la fois sur la mer, la baie des Anges et la ville. Exceptionnel !
04 – ALTHOFF VILLA BELROSE
À se perdre dans les contours poétiques des collines varoises, dont le dessin délicat s’avance sur la mer, le temps s’égrène à une cadence autre, propice à la contemplation des lumières changeantes sur le golfe de Saint-Tropez. Perchée sur les hauteurs verdoyantes de Gassin, Althoff Villa Belrose a justement su organiser ses volumes et espaces pour offrir ce panorama exceptionnel, où les pins parasols s’élancent avec une élégance feutrée sur les nuances de bleu du ciel et de la Méditerranée. À la manière d’une demeure familiale, le 5-étoiles, membre depuis son ouverture en 1997 de Small Luxury Hotels of the World, se vit dans une décontraction bienvenue, au gré de 40 vastes chambres cossues aux salles de bains en marbre italien, d’un salon qui donne sur les impressionnantes terrasses en escalier, d’un restaurant gastronomique inauguré l’an dernier, Club l’Indochine du chef The Duc Ngo, à la surprenante cuisine fusion, et d’une piscine pourvue d’un très agréable beach club.
Cette atmosphère chaleureuse doit beaucoup au Néerlandais Robert-Jan van Straaten, directeur général depuis plus de 20 ans, qui a fait de la région sa terre d’accueil et semble toujours apparaître au moment opportun pour s’assurer du bien-être de ses hôtes et distiller certaines de ses anecdotes les plus savoureuses : « Villa Belrose est à taille humaine, ce qui me permet d’accueillir chacun avec attention », note-t-il. Ce personnage de la scène tropézienne veille aussi à la collection de 14 villas d’exception, Belrose Villa Rental. Dotées chacune d’une piscine et agencées avec un sens certain de l’épure, elles donnent accès aux prestations de l’hôtel et aux services de son chef Jimmy Coutel, avec l’avantage d’une intimité totale. Et quel délice de se voir servir un bar en croûte de sel sur la vaste terrasse de l’inouïe Villa Beau Séjour (notre coup de cœur), décorée de bois précieux, avec, au loin, la lueur hypnotique que propage à certaines heures le village de Saint-Tropez.
Article paru dans le numéro 130 d’Hôtel & Lodge.