Paris Forever : le city guide

Est-ce l’effet coupe du monde de rugby ou JO 2024 ? Une revanche d’après-Covid ? Un phénomène de mode ? Le monde entier déclare sa flamme à Paris. Paris, capitale de l’art de vivre et de l’art tout court, épicurienne et festive, historique et branchée. Paris qui bouge, qui attire, qui séduit. À l’image de son offre hôtelière haute couture, plus riche, sublime et exaltante que jamais.

Texte Céline Baussay et Anne-Marie Cattelain-Le Dû

« Paris is always a good idea !«  Paris est toujours une bonne idée ! Et ce ne sont pas les touristes étrangers, revenus nombreux dans la capitale française, qui diront le contraire. Une vraie lame de fond ! Selon le Baromètre du tourisme parisien, plus de 583 000 arrivées aériennes devraient être enregistrées en octobre-novembre 2023 : + 22,1 % en moyenne vs la même période en 2022 ; + 31,3 % depuis l’Amérique du Nord et + 110,9 % depuis l’Asie du Nord-Est ! La magie de Paris opère toujours. N’en déplaise à ses habitants, qui se plaignent de sa saleté, de la difficulté d’y circuler. À tort ou à raison, là n’est pas la question : pour le visiteur de passage, Paris est un rêve, une carte postale… une fête ! Une icône, belle, glamour, charismatique, créative. 

Depuis plusieurs mois, c’est un festival. La culture, entendue au sens large, s’anime de lieux inédits : la très confidentielle Maison Gainsbourg, les galeries d’art Hauser & Wirth ou Dumas+Limbach, la mythique salle du Lido relookée par Alexis Mabille… Elle voit grand avec des événements majeurs (Paris Photo, Fashion Week, Paris+ par Art Basel…) ou des expositions temporaires, de tous styles et pour tous publics (Nicolas de Staël au musée d’Art moderne, le trésor de Notre-Dame au Louvre…). L’artisanat d’art et le design ne sont pas en reste avec des nouveautés comme l’École des arts joailliers de Van Cleef & Arpels dans l’hôtel de Mercy-Argenteau, la galerie Alain Ellouz de luminaires en albâtre, le showroom de la maison de porcelaine Revol… La scène gastronomique parisienne impressionne elle aussi par sa vivacité, sa capacité à surprendre, encore et encore, portée par une nouvelle génération de chefs et d’entrepreneurs qui n’ont pas froid aux yeux. C’est vrai dans tous les quartiers et dans tous les registres : de la street food à la cuisine étoilée en passant par les bistrots de quartier et les nouvelles tables des palaces.

Golden Poppy, le restaurant de La Fantaisie, un air de campagne à Paris, dans le 9e arrondissement. © Jerome Galland

Avec un total de 108 hôtels 5-étoiles dont 12 distingués palaces, Paris cultive dans les grandes largeurs l’art de recevoir à la française. Chaque mois, presque chaque semaine, c’est une nouvelle adresse qui fait le buzz, un jour Rive droite, le suivant Rive gauche. Le format boutique-hôtel avec une poignée de chambres est le plus en vogue. Si chacun a son designer, son atmosphère, son emplacement, tous les nouveaux établissements veillent désormais à s’ouvrir sur leur quartier et à proposer, à leurs clients comme à leurs voisins, des espaces chaleureux, élégants, pour paresser, dîner, s’amuser… en solo, en couple, entre amis ou collègues. Quel bonheur de découvrir ainsi le rooftop végétalisé de La Fantaisie, la piscine arty du Grand Mazarin, le restaurant coréen du Château des Fleurs, le patio végétalisé de la Villa des Prés, le bar secret de l’Hôtel Pulitzer Paris, le jardin enchanteur de L’Eldorado. Plus exclusif, l’ultra-luxe gagne aussi du terrain, avec notamment le précieux 1, place Vendôme, initié par la famille propriétaire de la maison Chopard, et en attendant l’hôtel Louis Vuitton, le premier sous ce nom, qui devrait s’installer en 2026 sur les Champs-Élysées. Paris lustre ses dorures, Paris prépare son futur.


La Fantaisie en son jardin 

Entre la bruyante rue Lafayette et le très animé faubourg Montmartre, dans le 9e arrondissement, rue Cadet, une bulle de verdure, un havre de sérénité.

En rooftop, le bar, avec sa terrasse où le gazon se faufile entre les pavés, ajoutant au côté champêtre. ©Jerome Galland

Dans la journée, la rue Cadet, qui doit son nom à Jean et Jacques Cadet, maraîchers, fournisseurs de la table royale au xvie siècle, on se fraie tant bien que mal son chemin entre les étals surchargés. Le soir, elle retrouve ses allures quasi provinciales. Avec, depuis quelques semaines, attirant le regard, une façade métallique vert olive qu’animent quelques tables et sièges au cannage vert pomme et jaune soleil, entourant l’entrée de La Fantaisie. 

Ce nouveau 5-étoiles désigné par le très en cour Martin Brudnizki, à la palette colorée, heurtée, cache bien son jeu, ses atouts. Le personnel charmant, veste beige façon jardinier, s’empresse de les dévoiler. La chambre d’abord, perchée au 5e étage, coquette et bien pensée, avec son balcon filant, sa table et ses deux chaises pour se conter fleurette. Sur le lit, un masque en satin vert émeraude pour clore les paupières promet des rêves bucoliques. La grande salle de bains à la faïence façon tissage vert amande et crème, au marbre vert citron encerclant les vasques, dévoile la plus jolie poubelle d’hôtel, en carton veiné vert sapin et rose camélia. On testera la douche après l’immersion, au sous-sol, dans les trois bains, très chaud, 39 °C, légèrement froid, 16 °C, bouillonnant, soulignés d’une frise végétale en minuscules carrés posés un à un par les collaborateurs de Martin Brudnizki. 

Requinqués, parés pour apprécier, sur le rooftop, une margarita dont le sel rehausse les saveurs, trinquant avec un Negroni à l’amertume maîtrisée. Le ciel s’étoile. Sous le zinc des toits, les fenêtres s’éclairent. Les oiseaux se sont tus. Le dîner au Golden Poppy, restaurant ourlant le jardin et même s’y projetant, s’annonce en harmonie, champêtre, avec la carte de Dominique Crenn, trois étoiles en Californie. La cheffe française rock, tatouée itou, préfère les notes végétales et iodées à celles carnivores. Dans l’immense salle à la cuisine ouverte, les fleurs éclosent à foison au plafond et sur les jalousies, pavoisent en guirlandes sur les murs. Tartare de thon rouge maturé relevé de feuilles de shiso, ceviche de bar lait de panais et leche de tigre, tarte aux champignons et piment d’Espelette, galette japonaise, chou, gingembre. Dîner léger, savoureux, parfumé, garant d’un sommeil de dryade masquée.

Avant ou sans balcon, qu’elles donnent côté rue ou côté jardin, des chambres sereines, pour vivre un Paris différent. ©Jerome Galland
Les salles de bains, plus ou moins grandes, avec ou sans baignoire, mais toujours parées de matériaux de qualité et d’accessoires stylés. ©Jerome Galland
Dominique Crenn, cheffe française, trois étoiles à l’Atelier Crenn, à San Francisco, signe au Golden Poppy sa première carte en France. © Amanda Demme

5-étoiles au firmament 

De nouveaux boutique-hôtels fleurissent dans Paris. Des adresses raffinées, des lieux de vie, des destinations en soi.

01 – LE GRAND MAZARIN

Insoupçonnable, le merveilleux patio décoré des fresques poétiques de l’artiste minorquine Sophia Pega. © Vincent Leroux

Après Crillon Le Brave dans le Vaucluse, Lou Pinet à Saint-Tropez et Le Coucou à Méribel, la collection Maisons Pariente a inauguré son tout premier hôtel urbain. L’emplacement est exceptionnel, dans l’effervescence du Marais. Après cinq ans de travaux, l’immeuble d’angle dévoile 50 chambres et 11 suites, une piscine intérieure et un spa, un jardin d’hiver, un cabaret, un bar et Boubalé, la nouvelle table ashkénaze, généreuse et festive, du chef étoilé Assaf Granit. Fasciné par le Paris aristocratique et les salons littéraires du xixe siècle, le designer Martin Brudnizki a imaginé un univers éclectique et facétieux, peut-être pas du goût de tous, qui mixe tons amande ou mandarine, armoires stylisées, lampes excentriques, étoffes épaisses, ciels de lit en tapisserie, fresques oniriques, objets chinés et tableaux sélectionnés par la galeriste Amélie du Chalard. En sollicitant des Entreprises du Patrimoine Vivant comme Henryot & Cie pour le mobilier sur mesure ou Pierre Frey pour les tissus, il rend hommage à sa manière, joyeusement farfelue, au meilleur de l’artisanat d’art.

02 – LE CHÂTEAU DES FLEURS

Le lobby, le bar et le restaurant coréen Oma se confondent en un seul espace, un lieu de vie chic et sophistiqué. © mrtripper

Après le Relais Christine, le Saint James Paris et le tout récent Norman, et avant d’ouvrir le Balzac en 2024, le groupe Bertrand Hospitality continue d’enchanter Paris avec ce merveilleux petit refuge urbain de 37 clés, à deux pas des Champs-Élysées, qui tire son nom d’un jardin connu comme lieu de festivités au xixe siècle. Le studio espagnol Quintana Partners a coordonné un travail magistral autour de l’artisanat d’art et des plus belles matières pour créer un univers chic et feutré, tout en rondeurs Art nouveau et en références parisiennes, bien au-delà des modes. Dès l’entrée, le chandelier en verre de Murano fait son petit effet. La suite est à l’avenant, et chaque élément du décor semble raconter une histoire. Bon point pour les suites en angle, le spa Omnisens, le restaurant coréen Oma et les magnifiques salles de bains rouges, rétro mais pas trop.

03 – VILLA DES PRÉS

Le lit est surmonté d’une œuvre d’art qui donne sa singularité à chacune des chambres. © Gaelle Le Boulicaut

Les pépites du coin de la rue 

Hôtels de quartier, hôtels d’habitués ! Ils symbolisent une conception de l’hospitalité urbaine ouverte à tous, accueillante et chaleureuse.

04 – HÔTEL PULITZER PARIS

Éloge des belles matières et de l’art dans les chambres baignées de lumière. © DR

Après Barcelone (le mythique Hotel Regina) et avant Buenos Aires, le groupe catalan Pulitzer Hotels a misé sur Paris avec 44 chambres, certaines mansardées, toutes très lumineuses, dans un immeuble parisien pur souche pensé par et pour les voyageurs, mais aussi pour les curieux de passage, sensibles aux ambiances et aux petites attentions. Sur les six étages, le décorateur espagnol Lázaro Rosa-Violán exprime avec finesse son style raffiné et sophistiqué, son goût des belles matières et de l’art. L’influence de Paris, de la Bourse et du faubourg Montmartre, de ses passages secrets et de ses théâtres de légende, se ressent jusqu’au restaurant, ouvert du petit déjeuner au dîner pour les clients de l’hôtel comme pour les habitants ou les employés du quartier. Agréable en toute saison, son patio sous verrière est l’endroit idéal pour se poser devant un café et prendre le temps de converser comme le faisaient les intellectuels, poètes et artistes de la Belle Époque.

05 – L’ELDORADO

Le trésor de l’hôtel : son merveilleux jardin au calme.  © Benoit Linero

Les créateurs de l’Hôtel Providence, près des Grands Boulevards, ont mis trois ans pour rénover et restructurer l’Eldorado, dans la très trendy rue des Dames, dans le 17e arrondissement. Reconstituant l’esprit d’une maison de famille avec l’aide du studio Vincent Bastie, ils ont créé 26 chambres dans la bâtisse principale, qui abrite également le bar et le restaurant prolongé par un jardin d’hiver, et 4 autres dans le merveilleux pavillon qui peut être privatisé, au fond de la cour arborée mise en scène par le paysagiste Xavier de Chirac. Tentures de velours aux imprimés fleuris, lits à encadrement bois, salles de bains en marbre et terre cuite, cheminées, bibelots, antiquités et tableaux chinés, mobilier réalisé sur mesure par des artisans d’art, collection de vinyles : le cadre est romantique et bucolique à souhait, la décoration éclectique et un brin désuète. Difficile de faire plus parisien et à la fois si exotique, quand on s’installe sous le palmier à l’heure du tea time pour se régaler d’un millefeuille.


Qui dort dîne !

Nombre de chefs bousculent les codes de la gastronomie. Avec eux,
elle paraît moins conventionnelle, décomplexée, et aussi plus accessible.

01 – KITCHEN

Stéphanie Le Quellec brise le tryptique entrée-plat-dessert avec brio. © Victor Bellot

Après La Scène, Mam et Vive, quel plaisir de retrouver Stéphanie Le Quellec, cheffe doublement étoilée, dans cette brasserie au pied de Madame Rêve, le 5-étoiles aménagé dans l’ancienne poste du Louvre. Un cadre époustouflant, hauteur sous plafond et boiseries d’inspiration xixe siècle, pour un assortiment de plats bien français, twistés par un condiment surprise, une présentation décalée, un nom cocasse, comme « l’os à moelle trop mignon » et, pour finir, les pâtisseries régressives de Pierre Chirac.

Stéphanie Le Quellec À Madame Rève © DR.

02 – LE 19.20

Norbert Tarayre dans un palace : un casting inattendu mais prometteur. © Joann Pai

Rue George-V, près des Champs-Élysées, Norbert Tarayre a débarqué cet automne tel un trublion des fourneaux avec la volonté farouche de célébrer le terroir français et les grands classiques de sa cuisine. Il réveille le céleri rémoulade avec des œufs de brochet fumés, sert l’épaule d’agneau de 10 heures avec de la betterave. La jeune pâtissière Hélène Kerloeguen suit le mouvement avec, sur son chariot, tarte au citron, riz au lait, baba au rhum… Nostalgie, nostalgie. Au déjeuner, entrée, plat, dessert à 49 €, dans un palace : imbattable !

Nobert Tarayre © Joann Pai

03 – LA TOUR D’ARGENT

L’île Saint-Louis, la Seine et Notre-Dame : un point de vue unique ! © Matthieu Salvaing

Cure de jeunesse, sous la direction de l’architecte Franklin Azzi, pour l’un des plus célèbres et des plus anciens restaurants français : depuis 1582, en vis-à-vis avec Notre-Dame, du haut de son sixième étage, en bord de Seine. Nouveau look, nouveaux espaces (un appartement où dormir, un rooftop où boire une coupe) et, depuis quatre ans maintenant, la cuisine du MOF 2004 Yannick Franques. Avec le canard en vedette mondiale. Et, bien sûr, la cave exceptionnelle de 300 000 bouteilles.


Les 4 adresses préférées de Victor Rego

Le chef concierge du Grand Mazarin a toujours vécu à Paris et officié dans différents palaces (Hôtel de Crillon, Mandarin Oriental Paris…) avant de mettre le cap à l’est dans le quartier-village du Marais, plein de vie et de bonnes ondes. 

© DR

01 – DATIL

« Une nouvelle adresse avec une cuisine essentiellement végétale, florale… écoresponsable. La cheffe Manon Fleury mène une brigade jeune et sympathique. Je parie qu’elle gagnera une étoile Michelin en 2024 ! »
datil-restaurant.fr

02 – GRAND COEUR

« Une brasserie haut de gamme dans une cour intérieure, au calme, presque un micro-gastro, avec le chef triplement étoilé Mauro Colagreco à sa tête. Dès que le soleil brille, le lieu est extra pour manger des plats d’inspiration méditerranéenne. »
grandcoeur.paris

03 – CREPOLOG 

« Des crêpes et des galettes, du sucré et du salé… Tout est excellent et c’est ouvert en continu. Nos clients, les Américains particulièrement, sont très demandeurs d’un service non-stop quand ils ont un petit creux. »
crepolog.com

04 – BAR NOUVEAU

« Un tout petit bar, très convivial, dans un décor Art nouveau et une ambiance électro. On s’installe autour du comptoir pour commander des cocktails réalisés sur mesure. Les jeunes qui l’ont ouvert, dont le bartender Remy Savage, sont très à l’écoute, ils ne se limitent pas à leur carte. »


Paris vu par…

SÉVERINE WAELCHLI
Directrice de la galerie Hauser & Wirth Paris

© Hauser & Wirth, photo Katharina Lütscher

« Hauser & Wirth rêvait d’ouvrir un espace à Paris, l’épicentre de l’art et de la culture en Europe depuis des siècles. Cette ville a été une source d’inspiration inestimable pour de nombreux artistes de la galerie (Louise Bourgeois, Barbara Chase-Riboud, Takesada Matsutani…), et les Parisiens apprécient l’histoire de l’art et le dialogue que nous créons entre les générations d’artistes. Conservateurs, collectionneurs, artistes et amateurs d’art : tous aiment Paris. C’est ma ville depuis 20 ans et j’ai constaté un regain d’énergie et d’excitation à l’égard de son offre de lieux, avec des musées fantastiques (le Centre Pompidou et le musée de l’Orangerie sont mes préférés) et l’arrivée de nouvelles collections, fondations et, bien sûr, de la foire Paris+ par Art Basel. »

HÉLÈNE ROCCO
Auteure de Paris, petit atlas hédoniste

© Tiphaine Caro

« Je suis née dans les Alpes et j’ai toujours pressenti que j’étais faite pour Paris, son effervescence comme la quiétude de ses grands parcs et canaux. J’ai longtemps vécu dans le 19e arrondissement, à quelques mètres des Buttes-Chaumont. J’habite désormais en banlieue proche, mais je continue à adorer ce quartier. Si je pousse plus loin, c’est souvent Rive droite, dans les 10e, 11e, 12e, 18e et 20e arrondissements, dont j’apprécie le caractère cosmopolite. Quand on aime bien manger, il y a sans cesse de nouvelles raisons de se réjouir. Paris a longtemps été à la traîne en matière de végétarisme, mais quelques très bonnes adresses ont récemment ouvert, à l’image d’Aube où la cheffe Carrie Solomon est en résidence jusqu’au printemps prochain, et de Faubourg Daimant, une table végane qui emprunte les codes de la cuisine bourgeoise. »

Article paru dans le numéro 131 d’Hôtel & Lodge.

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