À 32 ans, Daria, petite-fille d’Isabelle d’Ornano, fondatrice avec son mari Hubert de la maison Sisley, est directrice de tous les contenus, responsable de l’image. Et voue à l’entreprise familiale un attachement sentimental.
Texte Anne-Marie Cattelain-Le Dû
Travailler chez Sisley, une évidence ?
Au départ, non, même si c’est ma famille, et que ma maman, Elisabeth d’Ornano, a été longtemps l’égérie de Sisley. Élevée à Madrid, j’ai étudié aux États-Unis, puis suis rentrée chez Havas Media International comme planificateur et stratège média. C’est alors que Sisley, qui manquait de contenu éditorial, m’a proposé de rejoindre l’entreprise et de suivre une formation spécifique en Chine et aux États-Unis, pays très consommateurs de nos parfums. En Chine, c’est incroyable, ils inventent des prétextes pour justifier leurs achats, avec trois Saint-Valentin par exemple, le 14 février, le 14 mars, le 20 mai.
Et depuis ?
En sept ans, j’ai monté la cellule de création à Paris avec un studio de production au sein des bureaux. L’avantage de raconter Sisley, c’est que je connais l’histoire par cœur. C’est celle de ma vie et celle de ma famille. Parler d’Eau du Soir ou de Soir de Lune, c’est évoquer l’amour d’Hubert, mon grand-père, qui les a imaginés pour son épouse et non pour les commercialiser. Ma grand-mère a été longtemps la seule à les porter.
Vous êtes très proche de votre grand-mère ?
Elle est incroyable. À 87 ans, elle vient tous les jours au siège, me donne des idées qu’elle trouve dans les magazines, sur les réseaux sociaux. C’est une fan d’Instagram. Et surtout, elle joue un grand rôle dans la création des parfums. Ainsi, pour l’Eau d’Hubert, elle a bouturé un géranium de son jardin à l’odeur très particulière, confié ces boutures à différents nez pour qu’ils imaginent une fragrance. Izia, du surnom polonais de ma grand-mère, enfant, a été composé à partir d’une rose qui fleurit deux semaines en mai, une rose venue de Pologne. Et l’Eau Rêvée d’Aria, inspirée de mon prénom, est née d’une tubéreuse, Nardo, que mon grand-père et mon père cueillaient dans le jardin et portaient à leur boutonnière. La fleur de mon mariage. Facile, à partir de ces instantanés de vie, de créer du contenu et même d’imaginer les écrins.


Le parfum, c’est un voyage ?
Bien sûr, évocateur d’images, d’instants. J’adore le Mexique et curieusement, cette fleur de Nardo est originaire de ce pays où on l’appelle bâton de Saint-Joseph ou jasmin du Mexique.
Des hôtels au parfum
« Lorsque je voyage pour mon plaisir, quel que soit le pays, je cherche toujours les boutiques-hôtels, les hôtels charmants, authentiques, dont la décoration, la plus minimaliste possible, évoque le pays, la région, les habitants. Et bien sûr, je suis avant tout sensible au parfum, que je perçois à la seconde où je franchis le seuil, celui des chambres, des jardins, des restaurants. Et si une signature olfactive ou toute autre odeur me perturbe, je plie bagage discrètement et sors de mon sac ou de ma valise un de mes flacons préférés, l’Eau d’Hubert qui m’évoque tant mon enfance. Ou sur la plage, à Biarritz par exemple, Soir de Lune. Deux fragrances qui tissent des liens avec mes grands-parents d’Ornano. On y revient toujours… Sisley, c’est vraiment une saga familiale. »
Article paru dans le numéro 138 d’Hôtel & Lodge.