Lové au cœur du palace ouvert en décembre dernier, le restaurant du chef français David Martin embrasse l’esprit de ses murs légendaires tout en faisant le pari impétueux de la jeunesse. Une audace récompensée lors des Hôtel & Lodge Awards 2025 qui a sélectionné David Martin dans la catégorie chef.fe.
Texte Jean-Pascal Grosso
David Martin est un sage à la tête de rugbyman. Ou de boxeur mi-lourd. Larges épaules, verbe haut – ses origines du Sud-Ouest, probablement – et une opiniâtreté qui fait de lui une des figures du tout-Bruxelles culinaire. Le chef français avait déjà dynamité la carte de la Brasserie La Paix à Anderlecht. Le voilà, flibustier, à l’assaut du Palais Royal, le restaurant gastronomique du Corinthia Brussels, impressionnant palace ressuscité en lieu et place de l’Astoria, dans le quartier Botanique. Pour ce faire, l’âme rassembleuse, il n’y est pas allé seul : « J’aime la jeunesse, exulte-t-il. J’aime ces gamins qui ont les dents longues, leur énergie. Pas des endormis ! Je veux qu’ils aient une vision claire. » Aux fourneaux, Jean Kaczmarek – 24 ans et déjà tout pour briller – fait ainsi preuve de talent et de dextérité à s’accaparer l’âme inspiratrice de son aîné.
La sérénité du Palais Royal se marie ingénieusement à l’inventivité des menus décalés et gourmands conjugués en 7, 10 ou 12 plats. Les toiles bucoliques, les marbres et lustres d’époque, comme, dans l’assiette, les produits classiques, tout ici est respecté. Et c’est en cuisine que s’insuffle une magie d’aujourd’hui. Ainsi le chicon, ce tyran du souper des enfants du Nord, se révèle savoureux et fondant sous les braises du shichirin, le barbecue japonais. Le rouget, placide en surface d’une sauce au beurre et à l’huile de merguez, se met à ronronner de plaisir coupable. Quant aux desserts, ils ravissent sans jamais assommer. Le service est jeune également, prompt, maniant sans fausse note distance et petits soins. David Martin le confesse : « Il faut accrocher les clients à la finalité gustative de l’assiette et à l’expérience même du restaurant. Qu’ils se disent : “je le rajoute à mon carnet d’adresses” ! » Gageons, sans trop risquer, que cela ne sera pas trop compliqué.




Ouvert du mardi au vendredi, déjeuner et dîner. Le samedi, dîner uniquement. Menus en 7 plats (85 €), 10 plats (135 €), 12 plats (175 €).
L’esprit des lieux

Dix-sept ans que l’Astoria s’était endormi sous le regard vigilant de gardes et d’historiens qui, tant bien que mal, préservaient ce vaisseau fantôme des ravages du temps. Et puis, fiat lux!, le miracle s’est incarné dans le groupe Corinthia, d’origine maltaise, qui lui a redonné vie en mêlant habilement héritage et contemporanéité. L’influence des architectes, des designers a beau être ici plurielle, il n’y a rien de chaotique, de déplacé, dans cette ode au bon goût qui flatte la nostalgie sans jamais s’y enferrer. 126 chambres, dont 36 suites (5 suites signatures, exceptionnelles) et bonus suprême, un spa de 1 200 m2, sous pavillon Sisley.
Article paru dans le numéro 139 d’Hôtel & Lodge.