Pour vivre ses amours avec sa partenaire, Tarita, le sulfureux acteur des Révoltés du Bounty acheta l’atoll de Tetiaroa, à 15 minutes de vol de Tahiti. Puis imagina le métamorphoser en réserve écologique. Cinquante ans plus tard, The Brando respecte ses souhaits.
Sur les linteaux gris marquant le seuil de The Brando se profilent deux hippocampes. 40 millions d’années que ce curieux animal symbole de force, de générosité, de partage et de chance, vibrionne au fond des océans. L’hippocampe s’imposait avec évidence comme sceau pour ce resort de 35 villas qui, depuis le 1er juillet, dix ans jour pour jour après la mort de Marlon Brando, vogue sur les eaux du plus beau lagon des îles du Vent. Combien de fois, lisant les propositions de promoteurs et d’architectes, Marlon Brando leur retourna leurs projets ou les jeta à la poubelle, barrés de ces mots :
Mon atoll ne mérite pas cela. Je souhaite qu’il devienne un laboratoire d’études de l’environnement, un modèle d’intégration des hommes dans un écosystème fragile.
Si l’acteur recevait ces documents, c’est qu’il caressait l’ambition de construire sur Tetiaroa, acquis en 1965 auprès de la veuve du consul d’Angleterre Marjorie Berchel, un villagehôtel. Une structure 100 % écologique, « accessible aux savants, aux écrivains, aux penseurs, aux agriculteurs, aux pêcheurs, pour y inventer un nouvel art de vivre en harmonie avec la nature ». Mis à part une poignée de bungalows spartiates chahutés par un cyclone en 1985, le rêve de l’acteur n’aboutit jamais.
Mais, même après 1990, alors qu’il ne venait plus en Polynésie, il continua à se soucier de l’avenir de son très cher atoll, n’abandonnant jamais son idée première. L’un de ses proches, Richard Bailey, dit “Dick”, homme d’affaires américain lui aussi amoureux de la Polynésie et d’une Polynésienne recueillit souvent ses confidences. PDG du groupe Pacific Beachcomber, armateur des yachts Paul Gauguin et Tere Moana, sacré en 2014 meilleure petite unité de croisière de luxe, Dick va, à partir de 2006, avec l’accord des dix héritiers de Marlon, tout mettre en oeuvre pour donner corps à ses utopies.
Un éco-resort respectueux Faisant fi des difficultés, des coûts, des polémiques, l’ami américain, avec la complicité de l’architecte Jean-Jacques Picard et du décorateur Gilles Leborgne, dessine sur le motu de Onetah, celui où Brando vivait avec les siens, à la tahitienne, un complexe 100 % vert, énergies naturelles, recyclage des déchets et des eaux. Toits en pandanus, usage privilégié du bois et des matériaux locaux, pavage des salles de bains en galets polis, Spa en forme de nid d’oiseaux sur une lentille d’eau naturelle ou perché au faîte des arbres, les constructions ne heurtent en rien le décor originel. Faune et flore sont placées sous la protection de l’association Te Mana o te Moana.
Les essences de bois locales, blondes et acajou, participent à l’ambiance écolo
Sous l’égide de Cécile Gaspar, Docteur en écologie marine, elle forme les guides, dont Tumi, la petite-fille de l’acteur, et encadre les plongées, les découvertes du récif et des autres motus. Et, à l’écart des 35 villas avec piscine privée, des chercheurs et des étudiants venus du monde entier, bénéficient d’un laboratoire et d’un hébergement pour mener des recherches approfondies sur l’océan, financés par Tetiaroa Society.
À des milliers de kilomètres de Hollywood, qui vit s’éteindre Marlon après en avoir fait une star planétaire, 200 employés contribuent chaque jour à réaliser son rêve d’une terre préservée, tout en choyant les hôtes de ce lieu assurément unique, où le bonheur vous rattrape par surprise.
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