La Fabrique du luxe…une promenade dans le monde des marchands merciers du XVIIIe siècle

Jusqu’au 27 janvier 2019, le musée Cognacq-Jay met en lumière les marchands merciers parisiens du XVIIIe siècle à travers sa sublime exposition La Fabrique du luxe…

Depuis 1929, le musée Cognacq-Jay conserve la collection d’œuvres d’art léguée par Ernest Cognacq (1839-1928), le fondateur des Grands magasins de la Samaritaine. C’est l’hôtel de Donon qui accueille la collection comprenant de grands noms tels que Boucher, Fragonard, Tiepolo, Chardin, Houdon, Canaletto depuis 1990. Ce lieu privilégié a vu sa muséographie dynamisée grâce à la sensibilité de Christian Lacroix en 2014.

Anonyme, Candélabre à deux branches garni d’un oiseau et de fleurs, bronze doré et porcelaine, entre 1715 et 1774.
Paris, musée Cognacq-Jay (inv. J328) © Musée Cognacq-Jay / Roger-Viollet

« Marchands de tout et faiseurs de rien », c’est ainsi qu’est définie cette corporation des merciers (dont la plus ancienne mention remonte à 1137) par l’Encyclopédie de Diderot.

Le marchand mercier, pour mener à bien son activité, doit revêtir différents rôles : à la fois celui de négociant, d’importateur, de collecteur, de designer et de décorateur. Afin de satisfaire sa clientèle issue de la haute aristocratie, qui se montre très exigeante, il tisse un réseau international d’artistes notamment en Chine comme le démontrent de nombreux meubles livrés par Bernard II Van Risen Burgh, dont la commode de Marie Leczinska, ou encore l’encoignure de Carlin livrée par Darnault, toutes deux conservées au Louvre.

Martin Carlin, Encoignure livrée par Darnault pour le grand cabinet de Mme Victoire au château de Bellevue, 1785.
Ébène, laque du Japon, Musée du Louvre © RMN-GP (Musée du Louvre)

 

Pour réaliser les nombreuses commandes d’une clientèle toujours plus désireuse de nouveauté et d’éblouissement, le marchand mercier fait appel à différents corps de métiers, orfèvres, bronziers, ébénistes, pour élaborer de réelles œuvres d’art. Toute cette cohésion d’artistes et de matériaux plus luxueux les uns que les autres explique le prix élevés des pièces commandées. Pour ce faire, les marchands merciers faisaient réaliser des dessins des commandes afin de donner une idée du résultat final au client. Ainsi, une commode pouvait être coupée en deux et dessinée avec des ornements différents dans le but de permettre au client de choisir ce qui se rapprochait le plus de son souhait. Réaliser de tels dessins coûtait très cher, ce qui explique les deux propositions sur une même pièce.

Anonyme, Projet de lustre et applique, vers 1775.
Plume, encore brune, lavis brun, rehauts de bleu Musée des Arts Décoratifs © MAD, Paris

 

Les marchands merciers s’illustraient à travers un système de consommation brillant où la communication publicitaire était novatrice grâce à des dessins, des enseignes ou encore des cartes de visite. La qualité exceptionnelle de la clientèle, issue de l’aristocratie et même de la famille royale, contribuait à la renommée d’un marchand mercier. Tout le monde voulait un meuble dans le goût de ces clients prestigieux, ce qui induisait un phénomène de mode au cœur du secteur mobilier. Cela était très avantageux pour les marchands-merciers comme Duvaux qui recevait beaucoup de commandes de la part de Madame de Pompadour, favorite du roi, dont l’influence au sein de la cour fut très importante.

© B. Soligny & R. Chipault / Musée Cognacq-Jay

Si les adresses prestigieuses des merciers évoluent au cours du XVIIIe siècle, le secteur couvrant la rue Saint-Honoré, les boutiques du Palais-Royal et les quais conserve la prédilection de la noblesse parisienne comme des touristes.

A travers cette exposition La Fabrique du luxe, le musée Cognacq-Jay propose de découvrir cet univers passionnant à l’aide d’une centaine d’oeuvres d’art, de documents et d’archives illustrant les origines du luxe à la parisienne.

La scénographie met en scène des pièces baignées de différentes couleurs pastel. Le parcours nous invite à nous perdre au sein des collections permanentes du musée, ce qui renforce la compréhension de l’exposition en s’immergeant davantage dans l’univers de cette époque.

Cette expédition dans le passé nous amène à emprunter un magnifique escalier en bois hors du temps qui nous conduit tout en haut de l’hôtel Donon. Là, se trouve l’une des pièces maîtresses de l’exposition, la reconstitution à taille réelle de l’enseigne de Gersaint peint par Antoine Watteau. L’espace d’un instant, on se retrouve rue Pont Notre-Dame à l’endroit où se trouvait la boutique de ce célèbre marchand mercier, nommée Au Grand Monarque en 1720 puis A la Pagode. La frénésie des clients se fait ressentir, l’ambiance chaleureuse, le bruit de taffetas des robes des dames de la cour, l’odeur de peinture et du bois ; la magie opère et le voyage dans le temps atteint son paroxysme…

Reproduction théâtralisée de l’Enseigne de Gersaint © Studio Tovar

Le musée Cognacq-Jay réussit l’exploit grâce à La Fabrique du Luxe de nous ramener des siècles auparavant, auprès de ses précurseurs de génie, qui ont su se renouveler sans cesse, développer le monde de l’art, dépasser les frontières et mettre en place un système de communication innovant.

La Fabrique du Luxe, Musée Cognacq-Jay, jusqu’au 27 janvier 2019

8 rue Elzévir 75003 Paris

01 40 27 07 21

www.museecognacqjay.paris.fr

Texte : Anne-Sophie Coussens – Images : DR

 

 

 

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