Marrakech : La Mamounia change de tempo

A l’aube de son centenaire, le 5-etoiles légendaire de Marrakech sort son atout gagnant : la carte resort de luxe. Approche dynamique pour séduire des hôtes plus jeunes sans froisser les habitues.

Par Anne-Marie Cattelain Le Dû / Photos DR

La Mamounia ne vit pas en dehors des modes et du temps, recluse en ses jardins parfumés derrière ses hauts murs crénelés. En douceur, elle amorce sa révolution pour figurer, cent ans encore, dans le quatuor de tête des plus beaux hôtels d’Afrique, tout en anticipant les attentes d’une nouvelle génération de voyageurs.

Nouvelles, trois tentes en toile sont dressées entre piscine et hôtel. Deux invitent à se relaxer en petit comité, la troisième abrite cave et œnothèque.

Plus nomades, infidèles, sensibles aux good vibes, ils traquent les adresses comblant leur soif d’esthétisme, de gastronomie, de bien-être, de convivialité, préférant aux palaces, qu’ils jugent ennuyeux, un lieu en osmose avec leur mode de vie. C’est pour les séduire que les dirigeants de La Mamounia, dont Pierre Jochem, le directeur général, ont demandé au duo de designers Patrick Jouin et Sanjit Manku de réenchanter leur 5-étoiles.

La piscine mythique et son pavillon entièrement rénové où, le matin, les hôtes succombent à un brunch gargantuesque et raffiné.

En octobre dernier, sous un soleil de plomb, après une fermeture de neuf mois pour cause de Covid et de travaux, l’honorable dame, flanquée de ses deux « relookeurs », accueillait ses premiers hôtes avec un rien d’appréhension, craignant de désarçonner les habitués et de décevoir les primo-arrivants. Deux mois plus tard, l’hôtel affichait complet, recevant en majorité des Français.

Dans la tente œnothèque, sous le spectaculaire lustre artisanal en cordes, une table se prête aux dégustations et aux dîners privés, sous la houlette du sommelier.

« Pour écrire ce chapitre de La Mamounia, explique Patrick Jouin, je me suis rappelé cette phrase du Guépard : il faut que tout change pour que rien ne change. Avec Sanjit, nous avons imaginé, par touches subtiles, des surprises, des endroits secrets, à découvrir au hasard de ses pérégrinations dans l’hôtel et les jardins. » Telles, posées comme une évidence entre les restaurants et la piscine mythique, trois immenses tentes dont une abrite, au bas d’une envolée de marches rouge Hermès, une œnothèque et une cave parfaites pour des dégustations entre amis, des dîners privés.

Champagne, pastillas et macarons

Derrière ces « cabanes » de toile écrue, deux restaurants entre eau et verdure, surprennent tout autant. L’Italien et L’Asiatique, sous la spatule du plus américain des chefs français, Jean-Georges Vongerichten, se projettent dehors et dedans, selon l’ensoleillement et l’heure.

Le salon de thé de Pierre Hermé se déploie dans le patio. Décor des Mille et Une Nuits, souligné par des luminaires et lanternes exclusifs de la Maison Brossier Saderne, dans le Maine-et-Loire.

Le premier, spacieux, lumineux, ressemble à un jardin d’hiver. On s’y régale, sans cérémonial, d’assiettes généreuses. Le second, plus intimiste, plus chic, avec tables en émaux, lumières tamisées, tons bleu et or, se prête davantage aux tête-à-tête amoureux. Au cœur de l’hôtel, le salon-boutique de Pierre Hermé, écrin précieux, invite aux dînettes, croquant un pain perdu au curry, un Ispahan ou un macaron.

Hormis les portes-fenêtres agrandies pour accueillir la lumière naturelle, les chambres imaginées en 2009 par Jacques Garcia n’ont pas changé.

Et tout en préservant le cachet très orientaliste de la table marocaine, avec son enfilade de salons ravissants, pour l’inscrire dans ce mouvement trendy, l’animer davantage, Jouin et Manku l’ont coiffée d’un rooftop : un lieu de convergence, dès que le soleil disparaît, pour savourer un cocktail ou un lait d’amande à la fleur d’oranger, avant de redécouvrir les saveurs salées-sucrées d’une pastilla.

Sanjit Manku et Patrick Jouin, designers, duo de choc pour lifting délicat d’une centenaire.

Quand les oiseaux interrompent leurs conversations, que les cigognes s’endorment sur les cheminées voisines, que les étoiles trouent le marine du ciel, les fans de champagne et de caviar squattent l’une des neuf places du bar Churchill. Ils se lovent dans l’alcôve, façon wagon de première classe, clin d’œil discret à l’ONCF, Office national des chemins de fer marocain, actionnaire majoritaire de l’hôtel, ou se hissent sur les chaises alignées autour du comptoir en marbre noir aux courbes sensuelles.

Puis, bulles d’or et billes noires appréciées, ils gagnent next door la salle de ciné fleurant le cuir neuf, pour revoir, L’homme qui en savait trop d’Hitchcock, version de 1956, tourné pour partie à la Mamounia.

L’Atlas en ligne de mire

Dans quelle chambre séjournait la famille du Dr McKenna, personnage central de ce film ? Mystère. Une certitude : elle dévoilait déjà, au-delà de la cime des palmiers, l’Atlas souvent enneigé. Mais ouvrait-elle sur L’Hivernage, quartier branché de la ville, ou la Koutoubia, mosquée du xiie siècle ? Tout dépendait de son orientation.

Comme les 206 suites et chambres et les trois riads, elle a changé de décor en 2009, sous la patte de l’architecte d’intérieur Jacques Garcia. Moucharabiehs, stuc travaillé, bois sculpté, zelliges ponctués d’or… ces pièces patinées, intemporelles, évoquent davantage l’ambiance des Mille et Une Nuits de Pasolini qu’une scène de crimes à répétition. Ambiance plus favorable à un sommeil réparateur dans le noir profond assuré par les lourdes tentures. 

Secrets d’initiés

Sophie Demaret, spa manager de La Mamounia, nous ouvre son carnet d’adresses.

Valérie Barkowski Store : linge de maison. 142 Arset Aouzel, Dar Bacha.

Sabir Cuir : sur mesure, en 24 heures, babouches et souliers en cuir. Trik Dar El Bacha, 39 bis.

Tapikari : tapis anciens chinés et remis en état par Kari. 2 Derb Imdami Place Mokef.

Khalid Art Gallery : objets d’art, antiquités,
meubles, peintures orientalistes, jarres sélectionnés
par un collectionneur éclairé. À La Mamounia.

Le marché aux puces, derrière la porte peinte
par Delacroix.
Médina, quartier de Bab El Khemis.

Riad Larrouss de l’artiste Véronique Rischard, arbres peints à l’encre de Chine. 21 Derb Assbane.

Dar El Bacha, musée des Confluences, consacré au patrimoine. 175 Arset Aouzal Rd.

Galerie 127 : photographie contemporaine du monde africain. 127 avenue Mohammed V, 2e étage, Guéliz.

À fond la forme

Hammams, piscines intérieure et extérieure, salle de fitness entourée de verdure, coach sportif, cours de tennis, footing dans les 8 hectares entre plantes, fleurs et palmiers : La Mamounia joue avec splendeur le rôle de club healthy.

Ses installations de pointe se doublent, au Pavillon de la Piscine, d’une carte diététique pour qui le souhaite. Summum de cette approche bien-être, le spa que Sophie Demaret, ex de l’hôtel de Crillon, enrichit de nouveau soins signés marocMaroc et Valmont.

À tester pour une relaxation complète, le dernier massage signature à la cire de bougie chaude – incroyable –, avant un pique-nique vert, sous les orangers ou dans le potager de Rachid Agouray, chef de la table marocaine.

www.mamounia.com

Article paru dans Hôtel & Lodge 115

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